Origines de notre église

Origines de notre église

Qui sommes-nous ? D’où venons-nous ?

Regard sur les origines de l’église de Villard et du mouvement évangélique dans notre canton

  1. Toute assemblée des partisans de cette secte pour y exercer le culte… est défendue et sera immédiatement dissoute.
  2. Les personnes qui auront présidé ces assemblées, y auront officié ou auront fourni le local, seront punies de l’une des peines qui suivent.
  3. Tout acte de prosélytisme ou de séduction tendant gagner à cette secte, est interdit.
  4. Les contraventions aux articles 2 et 3 ci-dessus seront punies, ou par une amende… ; ou par une prison de discipline ; …ou par un bannissement.

D’où vient cette loi, visant à réprimer une communauté chrétienne, appelée « secte » ? D’un Etat islamique ? D’un gouvernement soviétique ? – Vous n’y êtes pas : il s’agit de la loi du 20 mai 1824, promulguée par le Grand Conseil du Canton de Vaud !

Mouvement du « Réveil »

1824. C’est le moment où le mouvement évangélique, appelé « Réveil », a commencé de se répandre dans notre canton. Il est utile de connaître quelque peu cette histoire, qui est la nôtre. Ce n’est pas pour nous accrocher à notre passé : notre Eglise a d’ailleurs beaucoup évolué, et elle reste ouverte aux changements, surtout s’ils sont entraînés par des progrès dans l’interprétation de la Parole de Dieu. Mais cela aide à nous faire comprendre de ceux qui nous rejoignent et de ceux qui nous entourent, car plusieurs de nos paroles et de nos comportements sont marqués par une manière de comprendre héritée de nos prédécesseurs. Par exemple, les mots « prière » ou « ministère » ont chez nous une couleur particulière, différente de celle que lui donnent d’autres Eglises. On peut aussi tirer des leçons utiles des réussites et des erreurs du passé.

Une évidence : le « Réveil » s’est produit dans une situation religieuse bien différente de celle que nous connaissons ici aujourd’hui. Maintenant, la majorité de la population déserte les Eglises. Et les Eglises, même « officielles », sont toujours plus détachées de l’Etat. Elles sont devenues, de fait, des Eglises de professants, même si elles se disent « multitudinistes » (c’est-à-dire composées de la totalité ou de la majorité de la population). Notre Suisse est devenue une terre de mission. Dans ce contexte, les diverses Eglises, du moins les protestantes, ne sont plus en situation de concurrence : elles ont avantage à collaborer, pour annoncer l’Evangile et prendre soin des faibles et des personnes éprouvées.

Au contraire, au début du 19ème siècle, l’Eglise était soumise à l’Etat (qui, par exemple, nommait les pasteurs sans que les laïcs aient leur mot à dire). A part les familles catholiques et juives, chaque Vaudois était considéré comme un chrétien réformé, dès sa naissance ! La vie d’Eglise était souvent marquée par des rites obligatoires pour tous, et des sermons soigneusement rédigés, mais qui sonnaient creux. Il était interdit d’exprimer sa foi ailleurs que dans les cultes officiels. Même les réunions du soir et les cellules de prière chez des particuliers ont été prohibées !

Dans cette situation, des pasteurs et des étudiants en théologie, ainsi que des particuliers, ont découvert la foi personnelle et la puissance de changement qui découle de l’œuvre de Jésus-Christ. Ils ont voulu vivifier à nouveau l’Eglise réformée, en lui rappelant ses racines : la Réformation, qui insistait sur le salut par la foi seule et l’autorité de la seule Ecriture sainte. Bravant le mépris populaire et les mesures répressives de l’Etat, ils ont pratiqué des rencontres fraternelles analogues à celles de nos groupes de prière. De plus, ils se sont engagés dans l’évangélisation et la mission en terre étrangère. Malheureusement, l’Etat et l’Eglise (qui ne faisaient qu’un) ont encore accentué la répression : voir la loi citée en tête de l’article. Loin d’arrêter le Réveil spirituel, de telles mesures en ont favorisé l’expansion. Autre résultat (combien navrant !) : la séparation. Les pionniers du Réveil ne voulaient pas fonder une nouvelle Eglise, mais ranimer l’Eglise réformée. Or nombre d’entre eux, notamment des pasteurs, en ont été exclus ; ainsi ils ont été amenés à fonder des Eglises ou Assemblées dissidentes : la première fut celle de Vevey, en 1824. Et l’hostilité entre les autorités ecclésiastique officielles et les communautés dissidentes est allée croissant, même si la loi de 1824 a été abrogée 10 ans plus tard.

Dans les communautés dissidentes, certains responsables ont fait de la séparation – événement malheureux – une doctrine, alors que d’autres, au contraire, comprenaient l’Eglise universelle comme le Corps de Christ, formé de tous ceux qui croient en lui, quelle que soit leur appartenance ecclésiastique. Sous l’influence de J. N. Darby, entre 1840 et 1845, le courant séparatiste a hélas entraîné de nombreuses communautés dissidentes, voire la majorité d’entre elles. La doctrine darbyste enseigne notamment que l’Eglise dans son ensemble, devenue infidèle, est en ruine et ne sera jamais restaurée ; conséquence : refus de toute structure « humaine » et de toute organisation formelle ; les fidèles sont invités à couper les relations avec toutes les Eglises et à préserver intact le trésor que le Seigneur a confié à ceux qu’il a rachetés ; à exclure, non seulement les infidèles, mais tous ceux qui gardent des contacts avec ceux qui sont jugés infidèles. Une telle doctrine ne pouvait pas manquer de produire des divisions ; ainsi, à plusieurs reprises depuis 150 ans, nombre de chrétiens (et parfois des communautés entières, comme récemment à Lausanne) se sont détachés des Assemblées exclusives (« darbystes ») et ont rejoint, soit nos Eglises évangéliques, soit l’Eglise libre .

Le « Réveil » à Lausanne

Et à Lausanne, quelle est l’origine de notre Eglise ? Des réunions avaient lieu en 1824 déjà, au domicile d’Alexandre Chavannes, pasteur bientôt condamné au bannissement. En 1828, c’est Marc Fivaz, un des pasteurs rayés du rôle des ministres de l’Église nationale, qui s’occupait de cette Église dissidente. Nous connaissons mal la suite de son histoire. Ce qui est sûr, c’est qu’à la fin du 19ème siècle, de nombreux anciens « darbystes » avaient rejoint la communauté. Bien qu’ayant rompu avec la doctrine séparatiste de Darby, ils n’en avaient pas renié tous les enseignements. Ceux-ci ont marqué profondément nos prédécesseurs : relevons notamment l’obéissance à la Parole de Dieu, la conscience de la sainteté de Dieu, l’engagement actif de tous les membres. D’autres aspects sont plus regrettables, et notre communauté les a peu à peu corrigés. Il y avait le souci de se démarquer des Eglises officielles : on refusait toute organisation formelle (c’est l’Esprit qui était censé appeler les responsables, sans qu’ils soient jamais reconnus par les autres membres) ; on ne disait pas « Eglise », mais « Assemblée », on ne disait pas « pasteur », mais « frère à l’œuvre » ; on repoussait la « liturgie » pour la remplacer par des prières et des messages spontanés ; on ne célébrait pas Noël ni Pâques ni Pentecôte.

Notre communauté a beaucoup évolué, surtout depuis 1950. Elle n’a pas seulement changé de lieu, passant de la rue du Pont à la Riponne et à la rue de la Tour, pour s’établir finalement à la chapelle de Villard, devenue vacante suite à la fusion de l’Eglise libre avec l’Eglise nationale. Elle a créé des statuts, désigné, par élection, des « anciens », exerçant de manière collégiale le ministère pastoral – et parmi eux, des pasteurs, travaillant à plein temps. Elle a progressivement ouvert aux femmes les divers ministères. Elle a développé des contacts fraternels avec d’autres Eglises. Si nous ne fusionnons pas avec elles, ce n’est pas parce que nous les condamnons. Mais nous pensons que la vie chrétienne peut et doit se vivre de diverses manières. J’ajoute que notre respect pour la Parole de Dieu, notre sens de l’autorité collégiale et de l’engagement de tous, notre intérêt pour la mission et l’évangélisation sont des valeurs qui, dans la situation de crise vécue par plusieurs Eglises, ont encore plus d’importance et de pertinence qu’il y a 200 ans.

Jean Villard

Lecture recommandée

Marc LÜTHI, Aux sources historiques des Eglises Evangéliques. Dossier VIVRE, éd. Je Sème, Genève, 2003

2 commentaire

    Morel

    Bonjour
    Je serais intéressée de savoir quels sont les ministères que peuvent exercer les femmes dans votre Eglise.
    Salutations en Christ.

    Vincenzo Ravera

    Bonjour Morel,
    Dans notre communauté, il n’existe pas de restrictions de ministères pour les femmes. Le fondement pour l’exercice d’un ministère est le discernement d’une vocation divine reconnue par la communauté.
    Meilleures salutations

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